16 mai 2021
La gloire du Père et du Fils
La gloire du Père et du Fils
Jn 16,25 - 17,5
Pour le message d’aujourd’hui, je me suis largement inspiré du commentaire de l’Évangile de Jean, de Frédéric Godet. Éditions de l’imprimerie nouvelle, Neuchatel,1970.
Je vous propose de méditer sur la première partie de la prière sacerdotale (les v. 1 à 5 du chapitre 17 de Jean). Mais il est important de voir le contexte dans lequel Jésus a adressé cette prière à son Père. Je lirai donc à partir du v. 25 du chapitre 16.
Les derniers versets du chapitre 16 de Jean constituent la fin d’un long entretien de Jésus avec ses disciples. Après leur avoir lavé les pieds et annoncé la trahison de Judas et le reniement de Pierre (chap. 13), Jésus les exhorte, répond à quelques questions, et leur annonce qu’il va les quitter (16,5). Les disciples pleureront, ils seront dans la tristesse (v. 20) ; ils seront dispersés (v.32), et connaîtront des tribulations (v. 33). Mais Jésus les encourage en leur disant « Moi, J’ai vaincu le monde » (v 33 c).
De quelle victoire Jésus parle-t-il ? Cette victoire, déjà remportée, est une victoire intérieure : il a résisté aux attraits du monde et surmonté ses terreurs au jardin de Gethsémané. Mais de plus, cette victoire morale va se réaliser concrètement dans l’œuvre rédemptrice, sur la croix qu’il a acceptée d’avance, cette croix qui marque définitivement la défaite du monde. En effet, Jésus ne va pas rester prisonnier du tombeau : il va ressusciter ; et il vit à jamais !
Voilà donc le contexte. Ensuite, vient le texte de la prière sacerdotale, dont nous allons étudier la première partie. Et tout de suite après, c’est le texte de l’arrestation de Jésus.
Je fais juste une remarque : Pourquoi a-t-on appelé cette prière « sacerdotale » ? Le sacerdoce, c’est ce qui définit la fonction du prêtre. Dans l’ancienne alliance, elle consistait, entre autres, à offrir des sacrifices à Dieu. La mort qu’on lui inflige, Jésus l’accepte ; il l’offre lui-même comme le prêtre offrait la victime dans l’ancienne alliance. C’est l’acte du souverain sacrificateur de l’humanité, qui offre son sacrifice, mais en s’offrant lui-même à Dieu.
Dans la première partie de sa prière, Jésus prie pour lui. Remarquons qu’il prie à haute voix. Cela signifie que tout en parlant à Dieu, il parle aussi pour ses disciples qui l’entourent ; non pas pour leur montrer comment il prie ; c’est une façon de les associer à la relation intime qu’il entretient avec son père, et peut-être de les entraîner à prier avec lui. C’est comme une anticipation de la communion de gloire qu’il demande pour eux au v. 24 : « Père, je veux que là où je suis, ceux que tu m’as donnés soient aussi avec moi, afin qu’ils contemplent ma gloire, celle que tu m’as donnée, parce que tu m’as aimé avant la fondation du monde. »
Lorsque Jésus prie pour lui-même, dans les v. 1 et 2, ce n’est pas sa propre personne qui l’intéresse, c’est l’œuvre de Dieu : « …glorifie ton Fils, afin que ton Fils te glorifie, selon que tu lui a donné pouvoir sur toute chair, afin qu’il donne la vie éternelle à tous ceux que tu lui a donnés. »
Lorsque, au début de sa prière, Jésus dit : « l’heure est venue », il parle de sa mort. Mais pour que cette mort aboutisse à la glorification du Fils, il faudra l’intervention du Père.
Pour bien comprendre pourquoi Jésus demande à son Père de le glorifier, il faut lire le v. 5 : « Et maintenant, toi, Père, glorifie-moi auprès toi-même de la gloire que j’avais auprès de toi, avant que le monde fût ». La traduction Parole Vivante est plus précise dans ce que Jésus demande : « Et maintenant, Père, revêts-moi de gloire en ta présence, rends-moi cette gloire que j’avais déjà auprès de toi avant le commencement du monde. » On le voit, le but de sa demande n’est pas pour sa propre satisfaction, mais pour la continuation et l’achèvement de son œuvre.
En effet, ce que Jésus veut, c’est un nouveau moyen d’agir. Il demande donc la réintégration dans son état divin ; il demande la possession de la toute-présence, de la toute-science et de la toute-puissance divines, dont il s’était dépouillé pour s’approprier un état humain véritable. Il ne peut continuer à glorifier Dieu et développer l’œuvre du salut qu’à cette condition. Son état personnel doit se transformer, comme il s’est transformé quand Jésus est passé de l’état divin à l’existence humaine.
Pourquoi était-il nécessaire que Jésus retrouve son statut divin ? Pour qu’il puisse envoyer son Esprit sur les hommes. C’est ce que dit Pierre à une grande foule au moment de l’événement de la Pentecôte : « Ce Jésus, Dieu l’a ressuscité ; nous en sommes tous témoins. Élevé par la droite de Dieu, il a reçu du Père l’Esprit-Saint qui avait été promis, et il l’a répandu comme vous le voyez et l’entendez. » (Act 2,32-33).
Il était indispensable que Jésus répande son Esprit sur les hommes. En effet, c’est l’œuvre de l’Esprit-Saint en eux qui permet aux hommes de reconnaître qu’ils sont pécheurs aux yeux de Dieu. C’est ce même Esprit qui les pousse à se repentir. C’est toujours ce même Esprit qui leur fait comprendre le sens de la mort de Jésus sur la croix, et qui leur révèle que Jésus seul est leur Sauveur et leur Seigneur. Sans l’intervention de l’Esprit, la raison est incapable de comprendre ces choses. ( Cf Rm 8,7).
Au v. 2, Jésus rappelle au Père ce qui lui donne le droit de demander : « Glorifie-moi ! ». En effet, c’est le Père lui-même qui a donné à son Fils la souveraineté sur l’humanité tout entière, lorsqu’il l’a envoyé remplir sur la terre sa mission de Sauveur. Paul écrit : « Dieu nous a fait connaître le mystère de sa volonté, le dessein bienveillant qu’il s’était proposé en lui (Jésus) pour l’exécuter quand les temps seraient accomplis : réunir sous un seul chef, le Christ, tout ce qui est dans les cieux et ce qui est sur la terre. » (Eph 1,9-10)
L’œuvre de salut que Jésus a à remplir au sein de l’humanité a en effet pour condition sa position particulière : « Tout pouvoir m’a été donné dans le ciel et sur la terre » a dit Jésus. À quoi ce pouvoir a-t-il servi ? À donner à Jésus l’autorité pour donner l’ordre à ses disciples de tous les temps de « faire des disciples de toutes les nations, de les baptiser au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit » (Mt 28,19).
Jésus demande donc à son Père de le glorifier, afin qu’il puisse donner la vie à ceux qu’Il lui a donnés. En effet, le vrai moyen de glorifier Dieu, c’est de communiquer la vie éternelle aux hommes, c’est-à-dire de les associer à la vie de Dieu.
Que faut-il comprendre dans l’expression : « Tous ceux que tu lui a donnés » ? Est-ce le même sens que « toute chair » ? Non ! « Tous ceux que tu lui a donnés » ne se rapporte qu’aux croyants. Jésus a bien reçu puissance sur tout homme vivant, c’est-à-dire « toute chair », mais sa mission est de sauver les croyants. Paul l’exprime ainsi : « Dieu a mis sa puissance en action dans le Christ, en le ressuscitant d’entre les morts et en le faisant asseoir à sa droite dans les lieux célestes, au-dessus de toute principauté, autorité, puissance, souveraineté, au-dessus de tout nom qui peut se nommer, non seulement dans le siècle présent, mais encore dans le siècle avenir. Il a tout mis sous ses pieds et l’a donné pour chef suprême à l’Église, qui est son corps… ». Le corps de Christ, ce n’est pas le monde : c’est l’église, c’est-à-dire le rassemblement des croyants.
v. 3 « la vie éternelle, c’est que ceux que tu m’as donnés te connaissent, toi le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ ». Dans ce verset, Jésus définit la vie éternelle d’une façon bien différent de celle qui nous vient spontanément à l’esprit. La vie éternelle pour beaucoup de chrétiens, c’est la vie avec Christ dans le Royaume de Dieu, après la mort.
Cette vision de la vie éternelle n’est pas complètement fausse, mais elle est tronquée, elle est limitée à l’au-delà, alors que Jésus la fait commencer sur cette terre, dès lors que le croyant connaît Dieu et Jésus le Christ.
Dans la phrase de Jésus, — La vie éternelle c’est que ceux que tu m’as donnés te connaissent — le verbe connaître doit être compris dans le sens que l’Écriture lui donne. C’est une connaissance intime, profonde, tel que Jésus en parle dans Jean 14,20 : « Quand ce jour viendra, vous reconnaîtrez clairement que je suis inséparable de mon Père, vivant dans une communion intime avec Lui, vous saurez aussi que vous êtes en communion avec moi, que vous vivez en moi, et que je vis en vous » (Traduction Parole vivante).
J’insiste sur cette intimité voulue par Dieu, mais qui n’est pas toujours prise au pied de la lettre. Écoutons ce qu’écrit Paul : « Ne savez-vous pas que vous êtes le temple de Dieu, et que l’Esprit de Dieu habite en vous ? » (1 Co 3,16). Et 3 chapitres plus loin, Paul est encore plus précis : « Ne savez-vous pas ceci : votre corps est le temple du Saint-Esprit qui est en vous et que vous avez reçu de Dieu » (1 Co 6,19).
Quel mystère ! Frères et sœurs. Et quelle intimité voulue par Dieu ! Christ vit en nous par son Esprit !
Venons-en aux 2 derniers versets : « Je t’ai glorifié sur la terre ; j’ai achevé l’œuvre que tu m’as donnée à faire. Et maintenant, toi, Père, glorifie-moi auprès de toi-même de la gloire que j’avais auprès de toi, avant que le monde fût ».
Au v. 1, Jésus demandait à son Père de le glorifier pour l’œuvre qu’il avait à faire : donner la vie éternelle à tous les hommes que son Père lui avait donnés.
Au v. 4, Jésus demande à son Père de le glorifier pour tout ce qu’il a déjà accompli sur la terre. Dans sa condition terrestre, il a glorifié Dieu, il a fait briller dans le cœur des homme son caractère sain et bon. Et pour poursuivre son œuvre de salut, il a besoin de revenir à l’état divin qu’il avait avant son incarnation.
Remarquons que Jésus ne demande pas à son Père une chose exceptionnelle. En effet, la gloire divine à laquelle il avait volontairement renoncé pour servir Dieu sur Terre, appartient à son essence même.
Comme il a été dit plus haut, en retrouvant son état divin, Jésus-Christ peut poursuivre l’œuvre de salut (qu’il avait commencée sur terre), en répandant son Esprit sur les hommes. C’est exactement le sens de l’Ascension et, dix jours plus tard, de Pentecôte.
Il semble que communautairement nous ayons oublié le sens profond de l’Ascension, puisque depuis de nombreuses années nous ne fêtons plus ce jour pourtant si important, qui est intimement lié à Pentecôte que nous allons fêter dimanche prochain.
Souvenons-nous, en effet, des paroles rapportées par Luc, que Jésus adresse à ses disciples : « Comme Jésus se trouvait avec eux, il leur recommanda de ne pas s’éloigner de Jérusalem, mais d’attendre la promesse du Père, dont leur dit-il, vous m’avez entendu parler ; car Jean (Baptiste) a baptisé d’eau, mais vous, dans peu de jours, vous serez baptisés d’Esprit Saint… Vous recevrez une puissance, celle du Saint Esprit survenant sur vous, et vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée, dans la Samarie et jusqu’aux extrémités de la terre. » (Act 1,4-5 ; 8).
De même que sans Noël, Vendredi Saint et Pâques n’existeraient pas ; de même, sans l’Ascension, Pentecôte n’aurait pas eu lieu !
Que serions-nous, sans l’Esprit Saint ? !
Que nos prières sachent glorifier notre divin Sauveur, pour l’œuvre de salut qu’il a accomplie sur terre et qu’il poursuit toujours, depuis son trône de gloire, jusqu’à son retour.
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