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11 août 2015

Apprendre à aimer

aimerAlain NADAL

Apprendre à aimer

1 Co 13,1-13


podcast

Qui n’admirerait pas la profondeur de la pensée de Paul dans ces lignes bien connues des chrétiens ?  Elles sont tellement célèbres qu’on les retrouve gravées dans le marbre sur un monument érigé devant l’église moderne de Corinthe, juste à côté du site archéologique. En effet, ce passage de l’épitre aux Corinthiens y est écrit en Grec, en Français, en Anglais et dans une autre langue que je ne reconnais pas.


 Si l’on considère ce texte comme un enseignement que Paul nous donne de la part de Dieu, un enseignement à mettre en pratique dans notre vie de chrétien, l’admiration dont je parlais au début a tendance à faire place au découragement tellement la barre est placée haut !

   Il nous semble, en effet que si nous étions capables de parler la langue des anges et de prophétiser, si nous avions toute la connaissance et la foi grande jusqu’à transporter les montagnes, si nous donnions tout ce que nous possédons pour nourrir les pauvres, si nous offrions notre corps en sacrifice, nous ne serions pas loin d’être parfait aux yeux de Dieu et il ne nous manquerait rien !

   Eh bien, pas du tout ! Même si j’avais tout cela, nous dit l’apôtre qui se met au même niveau que tous les hommes, si je n’ai pas l’amour, cela me sert de rien !

 

   Après avoir parlé des dons de l’Esprit au chapitre précédent (12), dons auxquels il accorde une grande importance, et avant de donner un enseignement, au chapitre suivant (14), sur la façon dont les dons doivent s’exercer, Paul insère le texte de ce matin. Les 3 premiers versets sont une sorte de mise au point qu’on pourrait résumer ainsi : « Ne confondez pas action et amour ». Il ajoute après cela un  hymne à l’amour : L’amour est patient, l’amour est serviable, il n’est pas envieux… etc, qui nous montrent notre petitesse dans notre capacité d’aimer.

   Remarquons que Paul place toujours l’amour à la première place. Pour preuve, ce qu’il écrit au v.13 : « Maintenant donc ces trois choses demeurent : la foi, l’espérance, l’amour ; mais la plus grande c’est l’amour ».

   On retrouve cette première place accordée à l’amour dans la liste du fruit de l’Esprit (Gal 5,22): L’amour est en tête des fruits que produit l’Esprit, avant la joie, la paix et les 6 autres fruits.

 

   Je veux souligner, car c’est important, que Paul n’associe pas automatiquement « acte charitable » et « amour », ce que nous avons souvent tendance à faire. En d’autres termes, nous pouvons très bien accomplir de très beaux actes charitables sans pour cela aimer ceux auxquels ils s’adressent. 

 

   Comme illustration de cette vérité qui nous concerne tous, je voudrais vous lire un texte tiré d’un roman d’Irène Némirovski, Suite française. L’histoire se passe en 1941 en France pendant l’occupation allemande. Une vicomtesse, catholique convaincue et assidue à la messe, qui vivait dans un petit village avait entrepris d’envoyer des colis de vivres aux soldats de ce village prisonniers en Allemagne. En tant que présidente de l’œuvre, elle chercha à convaincre les paysannes de donner de la nourriture non seulement pour leurs maris ou leurs fils, mais aussi pour les autres prisonniers qui souffraient de la faim dans les camps. À force d’arguments, elle finit par récolter une bonne quantité de vivres à envoyer aux prisonniers du village. 

   N’est-ce pas une belle œuvre de venir en aide à ceux qui ont faim ? Une œuvre qui semble mettre en pratique l’exhortation de Jean dans sa première épitre : « Petits enfants, n’aimons pas en parole ni avec la langue, mais en action et en vérité » (1 Jn 3,18) ? Ne répondons pas trop vite avant de connaître la suite. 

   Voici ce qu’écrit l’auteur : « En prenant congé, les paysannes tendaient à la vicomtesse une main rouge, crevassée par le froid de l’hiver, par les soins donnés aux bêtes, par la lessive, et chaque fois la vicomtesse devait faire un petit effort pour serrer cette main dont le contact lui était physiquement désagréable. Mais elle dominait ce sentiment contraire à la charité chrétienne et, par esprit de mortification, elle se forçait à embrasser les enfants qui accompagnaient leurs mères ; ils étaient tous gras et roses, gavés et barbouillés comme de petits porcs. Enfin la salle fut vide. Les fermières étaient parties. La vicomtesse soupira, non de fatigue mais d’écœurement. Que l’humanité était laide et basse ! Quel mal il fallait se donner pour faire palpiter une lueur d’amour dans ces tristes âmes… « Pouah ! » se dit-elle tout haut, mais comme le lui recommandait son directeur de conscience, elle offrit à Dieu les fatigues et les travaux de cette journée. »

   Cette histoire est certes tirée d’un roman. Mais si nous sommes sincères avec nous-mêmes, elle pourrait sans doute être tirée de certains épisodes de notre vie, non ?

 

   Ce qui m’a frappé lorsque j’ai relu l’exhortation de Jean, c’est qu’il ne dit pas seulement : « n’aimons pas seulement en parole, mais en action ». Spontanément, nous aurions tendance à comprendre que l’action est synonyme d’amour. C’est un peu comme cela que nous le vivons souvent ! Mais c’est parce que nous n’avons pas bien lu.

   En effet, Jean ajoute une nuance importante qui change tout : « n’aimons pas en parole, mais en action ET EN VÉRITÉ ». 

   Dans l’histoire que je vous ai lue, nous voyons bien que la vérité est absente. Or, lorsque la vérité est absente, la valeur des actes est corrompue, parce que l’amour aussi est absent.

 

   Cela peut être la répulsion qui corrompt les actes, comme dans l’histoire que je vous ai lue. Mais cela peut être aussi l’intérêt, le calcul, l’orgueil, la vanité, l’hypocrisie, le désir de se mettre en valeur, la condescendance et tant d’autres sentiments dont notre nature humaine est malheureusement capable.

   « Quand je distribuerais tous mes biens pour la nourriture des pauvres, quand je livrerais même mon corps pour être brûlé, si je n’ai pas l’amour, cela ne me sert de rien ».

 

   On se sent petit devant une telle affirmation, n’est-ce pas ! Et pourtant, elle n’a pas pour but de nous écraser ou de nous culpabiliser. Elle nous est donnée pour que nous prenions conscience de notre orgueil qui a toujours tendance à relever la tête. Elle nous est donnée pour que nous cherchions à toujours nous laisser conduire par Christ sur le chemin de la vérité et de l’amour qui sont en réalité le même chemin. Car il n’y a pas de vérité sans amour, ni d’amour sans vérité.

 

   Ce que Paul écrit et le commentaire que j’en fait nous permettent aussi de comprendre un texte qui nous dérange à première lecture. Je veux parler de Mt 7,21-23 où Jésus dit à ses disciples, donc aussi à nous : « Quiconque me dit : Seigneur, Seigneur ! n’entrera pas forcément dans le royaume des cieux, mais celui-là seul qui fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux. Beaucoup me diront en ce jour-là : Seigneur, Seigneur ! N’est-ce pas en ton nom que nous avons prophétisé, en ton nom que nous avons chassé les démons, en ton nom que nous avons fait beaucoup de miracles ? Alors, je leur déclarerai : Je ne vous ai jamais connus, retirez-vous de moi, vous qui commettez l’iniquité. » (On retrouve cette même parole terrible adressée aux vierges folles (Mt 25,12).

 

   Dans ce passage, Jésus parle de « faire la volonté de son Père ». Comment cela se traduit-il, faire la volonté de Dieu, selon le texte de Jean et le texte de Paul ? Cela se traduit-il seulement par des actes ? Non ! Un croyant fait la volonté de son Père céleste d’abord lorsqu’il… AIME. C’est comme si Dieu voulait nous faire comprendre que l’amour est le commencement et la fin de tout !

 

   En effet, les actes n’entraînent pas automatiquement l’amour. Par contre, l’amour entraîne automatiquement des actes que Dieu agréés. Soyons donc modeste lorsque nous disons que nous aimons. Vérifions d’abord que ce soi-disant amour a bien été suivi d’actes.

 

    De même qu’on n’accomplit pas des œuvres POUR être sauvé, mais PARCE QU’on est sauvé, de même c’est l’amour qui nous poussera tout naturellement à faire des œuvres qui plairont à Dieu et qui porteront du fruit.

   Dans son épitre, Jacques affirme que la foi sans les œuvres est morte (Jc 2,26). Les textes que nous avons cités nous permettent d’affirmer que les actes accomplis sans amour ont peut-être de la valeur aux yeux des hommes, mais beaucoup moins aux yeux de Dieu.

   Bien sûr, on peut se contenter de plaire aux hommes ! Mais ce n’est pas le but de ceux qui se disent chrétien.

 

   Alors, comment allons-nous faire, nous qui sommes si pauvres en amour ? La réponse est très simple, même si la mise en pratique l’est moins : Il faut apprendre !

 

   Si l’on voulait résumer simplement ce qu’est la vie chrétienne, on pourrait dire que c’est une formation permanente pour apprendre à aimer. On n’aura jamais assez de toute une vie pour savoir aimer. Ne nous leurrons pas : nous ne saurons jamais vraiment aimer sur cette terre. Nous serons  toujours d’éternels apprentis qui veulent apprendre à aimer pour ressembler à Celui qui aime véritablement : Christ.

 

   Comme je l’ai dit plus haut, le texte de Paul n’a pas pour but de nous culpabiliser sur notre incapacité à aimer comme nous devrions. Il ne nous condamne pas non plus! Il nous indique la voie à suivre pour honorer Dieu et ressembler de plus en plus à Jésus.

 

   Je ne suis pas en train de dire qu’il faut que nous prenions notre parti, que nous contentions de la pauvreté de notre amour ! Non ! De même que notre foi et notre sanctification sont destinées à grandir, de même notre amour est destiné à grandir, parce que c’est le plan de Dieu pour chacun de nous. Et cette croissance prend sa source en Christ, en Christ seul, et dans la relation que nous avons avec Lui.

 

   De même que nous sommes incapables de nous sauver nous-mêmes, nous sommes incapables d’aimer comme Christ nous demande de le faire : « Aimez-vous les uns les autres ; comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres » (Jn 13,34).

 

   Mais de même que Dieu nous sauve par grâce, par le moyen de la foi en Jésus-Christ (Eph 1,8), Dieu veut nous apprendre à aimer. C’est dans notre relation, dans notre abandon à Christ que se fera cet apprentissage qui, soyons-en conscient, durera toute notre vie.

 

   Une des conditions essentielles pour progresser en amour, c’est d’adopter l’attitude humble du péager de la parabole (Lc 18,9-14), c’est-à-dire de reconnaître, devant Dieu, que nous ne savons pas aimer, et de  lui demander jour après jour : « Seigneur, apprends-moi à aimer ».

 

   

 

10:51 Publié dans Prédications | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : aimer

Commentaires

Bonjour ALAIN,
MERRCI POUR CETTE SUBERBE PREDICATION

MAIS COMBIEN IL EST DIFFICILE D'AIMER !! sans doute faut il d'abord ètre assurée de l'amour de JESUS pour soi mème

j'essaye de garder cette assurance que Jésus veut le meilleur pour moi et qu'il me donne une nouvelle forçe chaque jour

A BIENTOT ALAIN , je t'embrasse Michèle

Écrit par : MICHELE FABRE | 11 août 2015

Encore une fois merci Alain pour ton message qui arrive tellement à point dans notre monde, notre société où le cadavre d'un petit enfant rejeté par la mer sur une plage choque mais ne dérange pas plus que cela ! où l'on parle beaucoup plus des agriculteurs qui sèment la zizanie sur les routes de notre pays et nettement moins des moyens que l'on pourrait trouver pour résoudre le problème de la migration de peuples entiers du aux persécutions de quelques fanatiques idolâtres !

Écrit par : Georges C. | 03 septembre 2015

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