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09 juillet 2014

É.R.F., quo vadis ?

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É.R.F., devenue ÉPUdF, quo vadis ?

  

Si je suis aussi familier avec toi, chère Église, c’est que je te connais depuis ma conception : j’assistais déjà aux cultes dans le sein de ma mère. Je n’ai jamais cessé de te fréquenter et de t’aimer. J’ai beaucoup appris de toi ; je t’ai servie en tant que paroissien puis comme pasteur. Bref, entre toi et moi, il y a un lien très fort, puisque tu n’as jamais cessé de faire partie de ma vie.


   Si je te pose cette question, c’est que je crois que tu as perdu la boussole spirituelle qui permet à l’Église du Christ de suivre le chemin de la Vérité, afin qu’elle ne se perde pas. Je constate avec tristesse que tu n’as pas l’air de prendre en compte la situation de plus en plus préoccupante, pour ne pas dire catastrophique, dans laquelle se trouvent de nombreuses églises locales de ce pays : cultes désertés ; groupes de prières absents ou squelettiques ; nombres de jeunes en constante régression ; moyenne d’âge croissante ; problèmes financiers récurrents ; disparition de l’évangélisation, remplacée par la promotion du protestantisme réformé ; pollution en ton sein de la pensée séculière, particulièrement visible dans l’exégèse des textes bibliques et dans les sujets proposés aux synodes. J’aborde ce problème plus loin.  

   C’est parce que je ne veux pas te voir mourir que je t’écris. J’aimerais tant que tu te remettes en question et que tu ne reproches plus aux autres églises ce que tu te défends de faire, mais que tu pratiques en réalité : considérer que tu as la meilleure théologie, même lorsque certains pasteurs chargés d’enseigner le peuple de Dieu professent que Satan n’existe pas ou que la résurrection de Jésus n’est qu’un mythe ! Intellectuellement, tu prônes la largeur d’esprit, et tu dis admettre en ton sein tout un éventail de théologies différentes. Pourtant, beaucoup de tes bergers pratiquent la ségrégation envers leurs collègues réformés de tendance évangélique. Tu es beaucoup plus bienveillante envers les positions libérales qu’avec ce qui représente pour toi l’horreur absolue : le fondamentalisme.

   Je vais passer en revue quelques points qui me semblent poser problème, en espérant que tes instances dirigeantes y accorderont toute l’attention qu’ils méritent, si elles veulent qu’on continue à parler de toi comme un corps vivant animé par l’Esprit Saint, et non pas comme d’une église-musée.

Le fichier

  Tu es très fière de proclamer que tu es une église multitudiniste et tu fais un complexe de supériorité par rapport aux églises confessantes chez qui tu  dénonces ou crains une dérive sectaire. Tu ne vois pas que ta dérive à toi, c’est de devenir de plus en plus une église de non-convertis, de chrétiens sociologiques. Tes fichiers sont constitués à plus de 70% de membres en marge de l’église depuis plusieurs décennies parfois, que seuls quelques anciens connaissent. Ils ne participent plus à rien, ni spirituellement, ni matériellement, ni financièrement, mais tu les gardes quand même dans tes classeurs. Pourquoi ? Dans tes rapports statistiques annuels, tu demandes aux pasteurs et présidents de conseil presbytéral d’indiquer le total des réformés connus (enfants compris). Et dans une note explicative tu précises : « Ce total comporte toutes les personnes connues comme réformées d’origine ou d’adhésion, les enfants baptisés et les enfants non-baptisés mais destinés à être confiées à l’Église Réformée ». À quoi cela te sert-il ? À te gargariser avec des chiffres faux ? Tu sais pourtant comment cette ligne est remplie : d’années en années, on reprend le même chiffre, en le modifiant un peu pour faire « plus vrai ». Ce décompte peut donner la situation suivante : 2500 réformés connus, mais 30/40 personnes aux cultes, en moyenne.

  Pourquoi tiens-tu tant à ces 2500 noms sur un fichier ? Penses-tu que c’est avec eux que tu vas remplir l’église ? Non ! Tu n’y crois pas parce que l’expérience prouve qu’à l’exception de quelques uns, ceux qui ont quitté la communauté depuis si longtemps n’y reviennent souvent que pour se faire inhumer.

L’évangélisation

  Il y a une dizaine d’années, j’avais lu dans le dossier préparatoire d’un Synode régional qu’il fallait que les églises passent d’une logique d’accompagnement à une logique d’annonce. Tu ne peux pas savoir combien cette vision des choses m’avait réjoui, à l’époque, lorsque je l’ai découverte. J’espérais que ce virage salutaire serait suivi des faits. Mais je m’aperçois que rien n’a vraiment changé dans les mentalités. Tu continues à confondre les concerts, les conférences et les expositions sur le protestantisme avec l’évangélisation. Faudra-t-il que les chrétiens protestants en arrivent à être une espèce en voie de disparition pour que tu ne te contentes pas d’un effet d’annonce et entres de plain pied dans la mission première de l’Église ?

Membre d’église et membre de l’association cultuelle

   Devant la baisse chronique des effectifs de l’église, tu as décidé un jour de ratisser plus large pour faire entrer dans l’église quelques personnes supplémentaires qui conservent un petit intérêt pour la vie spirituelle. Mais pour ne surtout pas les effaroucher, tu leur demandes simplement de « reconnaître que Jésus-Christ est le Seigneur », et tu les invites« à participer à la vie spirituelle, cultuelle et matérielle, et à travers elle (l’église) à la mission de l’Église réformée de France, selon les convictions exprimées dans sa Déclaration de foi, en mettant au service des autres les dons qui leur sont confiés. »

  Intellectuellement, la formule est belle, et on dirait que c’est ce qui t’importe le plus. Peu importe qu’ils connaissent ou non ce que contient la déclaration de foi, qu’ils répondent ou non à ton invitation de participer à la vie de l’église. Quant à la formule « Jésus-Christ est le Seigneur », ne crois-tu pas que l’article indéfini « le » est un peu léger. Bien sûr, le Christ est le Seigneur ! Mais, dans l’église, ne crois-tu pas qu’il faudrait que chacun puisse dire « mon » Seigneur ? Si Christ est le Seigneur « des autres », qu’est-ce que cela va changer dans ma vie ?

  Dans ce processus pour être membre d’église, je reconnais que tu es fidèle au principe multitudiniste et qu’une perspective confessante de l’Église ne t’effleure pas.

La liste électorale

  D’après la Discipline, seuls les membres de l’association cultuelle, à qui tu demandes simplement de pouvoir dire : « Jésus-Christ est le Seigneur » (c’est bien le minimum ! Même un perroquet peut le dire !) peuvent être inscrits sur cette liste. Dans la réalité, il y a une chasse aux inscriptions, et tu sais bien que les chasseurs ne sont pas regardants sur ceux qui veulent bien s’inscrire. L’essentiel, c’est de faire du nombre. Ainsi, de nombreuses personnes inscrites sur cette liste deviennent des électeurs et peuvent participer aux débats à l’occasion des assemblées générales.

  Dans ce système qui semble te convenir, il est parfaitement possible à quelqu’un, dûment inscrit sur la liste électorale, de prendre la parole lors des discussions de l’assemblée générale annuelle, de voter pour élire les membres du conseil presbytéral, de voter le budget, les orientations de l’église, sans qu’il n’ait jamais participé à aucune activité d’église tout au long de l’année, et même sans s’être acquitté de la cotisation minimale censée être obligatoire. Ce n’est pas une simple hypothèse : cela se pratique, hélas ! Que penses-tu d’un budget voté par une partie des membres qui ne donnent rien ou des miettes ? Que penses-tu de conseillers élus par des membres qui se désintéressent totalement de la vie d’église ? Que penses-tu d’orientations spirituelles votées par des membres qui si peu impliqués ? Je vais te dire ce que j’en pense : tu risques d’être de plus en plus gouvernée par l’esprit de l’homme, au lieu d’être conduite par l’Esprit-Saint.

Le conseil presbytéral

   ─  Dis-moi, ma chère Église, sur quels critères sont choisis les membres de l’association cultuelle qui se présentent au suffrage des assemblées générales pour faire partie du conseil presbytéral. Est-ce sur leur foi ?

   ─  Pas forcément !

   ─  Sur leur vie de prière ? 

   ─  Pas forcément !

   ─  Sur leur présence aux cultes ?

   ─  Pas forcément !

   ─  Sur leur engagement dans l’église ?

   ─  Pas forcément ! Bien sûr, s’il y a tout cela, je ne suis pas contre ! Ça ne peut pas faire de mal ! Mais si ces critères ne sont pas remplis, on en choisit d’autres.

   ─  Lesquels ? Tu peux me donner des exemples ?

   ─  Eh bien, cela dépend de l’urgence qu’il y a à avoir le nombre minimum de conseillers requis par la discipline. Il faut être réaliste : on a de plus en plus de mal à trouver des conseillers. Alors, on ne peut pas trop tenir compte de ce que dit l’Écriture sur ce que devrait être un membre du conseil ; l’essentiel c’est d’être en règle avec la discipline.

   ─  C’est triste !

   ─  Peut être, mais c’est comme ça ! Parfois, le critère c’est d’essayer de rattraper quelqu’un qui n’a pas mis les pieds à l’église depuis 10 ou 15 ans, mais qui connaît bien la comptabilité ou les problèmes immobiliers.

   ─  Et ça marche ?

   ─  Pas souvent. Parfois, c’est pour avoir un représentant des différents secteurs de l’église, dans le cas des paroisses de disséminés. Tu comprends, il faut un certain équilibre entre les secteurs ! D’autres fois, c’est pour exaucer le vœu d’un synode qui demande à chaque conseil d’avoir un jeune parmi ses membres. Le but, vois-tu, c’est d’arriver à faire le nombre requis par la discipline. Et lorsqu’on y arrive, on est content. On a l’équipe au complet !

   Chère Église Réformée, ne me dis pas que tu ne sais pas que cela se passe souvent ainsi dans les églises locales ! Ou bien alors, c’est que tu fermes les yeux pour ne pas voir. La brochure que tu distribues dans les conseils, Le conseil presbytéral, un ministère aux mille facettes, est très profonde, très bien faite. Elle décrit bien ce que devraient être un conseil et un conseiller presbytéral. Mais en amont, ton système constitue un puissant facteur d’altération de la fonction.

L’autorité souveraine des Écritures

   La déclaration de foi de l’Église Réforme de France, lue au début de chaque synode, affirme : « Avec ses pères et ses martyrs, avec toutes les Églises issues de la Réforme, l’Église Réformée de France affirme l’autorité souveraine des Saintes Écritures, telle que la fonde le témoignage intérieur du Saint-Esprit, et reconnaît en elles la règle de foi et de vie. Pour obéir à sa divine vocation, elle annonce au monde pécheur l’Évangile de la repentance et du pardon, de la nouvelle naissance, de la sainteté et de la vie éternelle… »

   Plus de 10 ans après un premier ballon d’essai pour tenter de faire admettre la nomination dans l’Église Réformée de pasteurs se déclarant ouvertement homosexuels, voilà que, à la faveur d’une nouvelle loi civile sur le mariage pour tous, tu à remis à l’ordre du jour des Synodes régionaux 2014 la question de la bénédiction de mariage des couples homosexuels, avec une tenue de camouflage qui ne trompe personne : réflexions sur la bénédiction ! Tu sembles être passée maîtresse dans l’art de noyer le poisson ! Es-tu sourde aux remous soulevés par cette provocation ? N’as-tu pas peur d’un schisme ?

   Le prochain Synode national de 2015, qui doit se prononcer pour ou contre la bénédiction de mariage de couples homosexuels, va-t-il piétiner allègrement la déclaration de foi de l’ÉRF pour qu’on puisse dire de l’ÉPUdF : « Voilà une église moderne, ouverte, à la page ! » ou bien lui rester fidèle ? Est-ce à l’Écriture de s’adapter à la société ou aux chrétiens d’être fidèles à l’Écriture ?

   Si, par malheur, le Synode national 2015 perdait le nord, je te conseillerais vivement de faire rapidement disparaître de la Bible tous les passages où l’homosexualité n’est pas considérée comme une expression normale de l’amour, afin que tu ne sois pas confrontée à ce redoutable problème : opposer TA vérité fluctuante à celle, immuable, de l’Écriture.

   Toi qui abhorres le fondamentalisme, ne crains-tu pas qu’on te traite de « relativiste » ?

   Chère Église Réformée, j’espère que tes pasteurs et tes délégués laïcs au prochain Synode national de 2015 se souviendront du principe protestant Sola Scriptura, et remettront leurs pas dans ceux de leur Seigneur Jésus-Christ pour prendre la seule décision fidèle à l’Écriture.

11:41 Publié dans Témoignage | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : erf, epudf

Commentaires

Je suis entièrement d'accord avec cette analyse !
Il est certain que l'église se laisse glisser doucement mais surement
sur le chemin du laxisme pour suivre la mouvance actuelle qui est celle de la tolérance à n'importe quel prix, et surtout du refus de lire et
de mettre en pratique les enseignements de l'écriture .
Mobilisons nous donc dans la Prière , puisse l'Esprit Sain conduire nos
dirigeants spirituels lors du synode de 2015.

Écrit par : FABRE Michèle | 10 juillet 2014

Si l'Église réformée est bien telle que décrite dans cette lettre ouverte, il ne faut pas se faire d'illusion, beaucoup d'églises évangéliques ont aussi ce genre de problèmes, appuyant certains caractères qui font de l'Église ce qu'elle est pour mieux occulter certains autres n'ayant ni le courage ni les moyens de changer ceux ci.
Je suis évangélique depuis de nombreuses années mais peut on encore dire que nos églises sont confessantes ? Lorsqu'il y a de l'évangélisation c'est malheureusement à doses homéopathiques et trop souvent sans suivi derrière !
Il est étonnant de constater que dans les pays où l'Église est persécutée c'est là que le développement est le plus spectaculaire, la foi y est forte au point d'accepter la persécution !!! Faudra-t-il que notre pays connaisse de tels moments pour revenir à son Dieu et savoir reconnaître ses idoles ?

Écrit par : Georges C. | 10 mars 2015

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